Mon travail de recherche plastique concerne les trois constituants du tableau
traditionnel : le châssis, la toile, la peinture. Ils sont nommés suivant
l'ordre de la fabrication d'un tableau.
Tout
d'abord il y a le châssis, premier constituant car il est bien l'armature
pour supporter la souplesse de la toile. Ensuite la toile, deuxième
constituant, tendue sur le châssis où sa surface demeure le support direct
de la peinture. Ces deux constituants ont la simple fonction de support.
Enfin la peinture, troisième constituant du tableau, la seule à posséder une
valeur esthétique.
Les
constituants du tableau traditionnel ont été révélés dans leur matérialité
par les artistes du mouvement Supports-Surfaces à la fin des années
soixante. Pour cela ils ont déstructuré le tableau traditionnel. A la suite
de ce « terrible » événement pictural, la déstructuration du tableau
traditionnel, l’histoire de la peinture semble aboutir à une sorte
d'impasse. Certains pensent même que celle-ci est morte, face aux nouveaux
systèmes optiques modernes pour approcher la réalité.
Cependant dans cette « impasse », dans ce vide, on peut y voir l'espace
nécessaire pour une restructuration. Celle-ci consiste plus dans
l'intention, à être une construction après la mutation du deuxième
constituant. Ainsi la mutation de la toile est le résultat d'un acte
important. En effet, celle-ci est préalablement découpée en bandes à l'aide
d'une paire de ciseaux, avant d'être tendue sur le châssis. Cet acte est le
pivot de la mutation pour réaliser la construction d'un "objet-tableau".
Ainsi la mutation de la toile va ouvrir le passage allant du tableau
traditionnel à l' "objet-tableau", en absorbant la déstructuration exécutée
par le mouvement Supports-Surfaces. En même temps, cette mutation plastique
réalisée à la suite de la déstructuration du tableau, démontre qu’il est
effectivement possible d’aller au-delà de Supports-Surfaces.
L’existence des objets-tableaux à l’aube du deuxième millénaire,
c’est-à-dire presque quarante années après Supports-Surfaces sur la ligne
chronologique de l’histoire de l’art, révèle la possibilité de l’art
pictural à s’exprimer en exploitant au maximum les qualités plastiques du
châssis, de la toile et de la peinture.